Dépasser le paradigme de la tour d’ivoire ?
En raison d’une erreur de lien dans notre lettre d’information par courriel, le billet du 15 mars intitulé « Le CoNRS dans le collimateur » est à retrouver à cette adresse. Nous traitons ici succinctement de ce sujet avant d’aborder la seconde partie du billet sur la liberté académique.
CNRS — En juin 2018, M. Petit présenta aux présidents des sections CNRS son projet de réforme de l’admission au concours de chercheur. Il s’agissait de n’attribuer plus que la moitié des N postes proposés sur la base d’un classement issu de l’évaluation scientifique des candidats et de leurs projets. L’autre moitié (N/2) serait pourvue par la bureaucratie du CNRS au sein d’un pool de N candidats non classés, mais retenus par les pairs. Cette moitié de postes servirait au « dialogue de site » et au « pilotage scientifique ». Cette idée, un moment abandonnée, est réapparue jeudi 4 mars sous une forme plus simple : M. Petit a demandé aux sections du CNRS de ne plus publier qu’un pool de candidats classés par ordre alphabétique, autrement dit non classés.
Compte tenu de la pénurie organisée de postes, M. Petit en ayant supprimé 50 sur 300 depuis son arrivée, il n’y a pas d’inquiétude à avoir sur le niveau des candidats : tous mériteront un poste pérenne. Le danger est ailleurs. Les conditions du concours étant affichées par la direction générale du concours (DGDR) sur le site du CNRS (« [les jurys] établissent ensuite, pour chaque concours, la liste des candidats déclarés admissibles par ordre de mérite »), on peut se demander ce qui motive l’empressement de la direction du CNRS à prendre le risque d’un recours qui annulerait tous les concours. La volonté de profiter de l’affaiblissement des chercheurs et des enseignants-chercheurs membres des jurys pour enfoncer le clou de la bureaucratie dans le recrutement des futurs chercheurs ? Et en vertu de quels critères le jury d’admission compte-t-il sélectionner les candidats ? Le choix est large si l’on en croit les pratiques promues par la ministre et les administrateurs actuels de la recherche et de l’université : rapports clientélistes, opinions politiques des candidats, thèmes de recherche à paillettes…
Rappelons que la bureaucratie de la recherche n’a de légitimité que dans le contrôle des conditions de travail des sections, et en particulier des conflits d’intérêts. Voir notre billet du 15 mars, plus détaillé, à ce sujet.
Garantir une liberté académique effective — Vous trouverez ici la seconde partie de notre synthèse : Dépasser le paradigme de la tout d’ivoire ?