Hcéres : première victoire et nouvel appel à candidatures
En janvier dernier, nous avons posé nos candidatures à la présidence du Hcéres sur la base d’une profession de foi commune, parue dans Le Monde.
Nous avons rappelé que la science suppose l’autonomie des savants, chercheurs et universitaires, seuls à même de décider collectivement des normes et des procédures d’évaluation des travaux scientifiques et des institutions. Nous anticipions que le ministère rejetterait nos candidatures, sans même les examiner. La stratégie consistait à empêcher, par la dépréciation publique, une procédure opaque, percluse de conflits d’intérêts notoires. Pour ce faire, nous avons collectivement rappelé les normes d’intégrité et d’indépendance qu’exige le principe d’autonomie de la recherche scientifique.
Nous pouvons en apprécier aujourd’hui les effets. Le conseiller ESR du Président de la République, M. Coulhon, qui avait procédé lui-même à l’audition à l’Elysée des autres candidats, n’a pas été nommé. Le ministère s’est vu contraint de saisir son comité de déontologie, lequel n’a pu que constater l’ampleur du problème et demander l’arrêt immédiat de la procédure et le lancement d’un nouvel appel à candidatures. Cette première victoire, pour ténue qu’elle soit, valide la capacité de la communauté académique à reprendre le contrôle de ses propres normes.
Le ministère a annoncé la publication prochaine d’un nouvel appel à candidatures, moins opaque. Il ne s’agit pas de nous en satisfaire, mais de l’utiliser pour tenter à nouveau de faire bouger les lignes : en effet, c’est le concept même de l’évaluation managériale qui s’oppose à l’ambition que nous portons, celle d’une science inscrite dans le temps long et au service de l’intérêt général, avec toutes les garanties matérielles et statutaires que cela implique. Il convient donc de saisir cette nouvelle occasion de reprendre possession de notre métier, et de refaire science collectivement.
Le constat n’a pas changé: le processus de réformes engagé depuis quinze ans, et qui se poursuit avec le projet de LPPR, est un échec y compris à l’aune des critères de ses promoteurs, et à plus forte raison à l’aune des nôtres. Le Hcéres est un levier dont nous souhaitions nous saisir pour porter une plus haute ambition que celle des réformateurs: l’ambition du temps long, de l’autonomie, de la liberté, de l’intégrité et de l’exigence, c’est-à-dire aussi l’ambition de la démocratie savante et de l’intérêt général.
Nous allons devoir répondre au nouvel appel d’offre, en faisant en sorte que nos candidatures ne puissent pas être écartées par la commission sur une base arbitraire. L’objectif restera identique : nous donner les moyens de restituer à l’ensemble du corps savant le contrôle de son activité au travers de normes et de procédures dont il doit lui-même décider.
Dans le même temps, en appui au mouvement de réappropriation ravivé par le retour du projet de LPPR, nous vous enverrons dans les jours à venir un appel à contribution pour les Assises de la refondation qui se tiendront en septembre, suite à l’appel du 20 mars 2020, que vous pouvez encore signer.
Nous avons également souhaité recueillir par sondage votre opinion concernant l’opportunité ou non d’une candidature symbolique de Camille Noûs à la présidence du Hcéres en plus de toutes nos candidatures : cette candidature serait certes instantanément recalée, mais elle poserait à nouveau l’incompatibilité de principe entre une institution bureaucratique comme l’Hcéres et les valeurs cardinales d’une science intègre et autonome.