Au Monopoly des savoirs
Deux brèves cette semaine et une série de 50 questions adressées aux candidates et aux candidats à la présidentielle.
Lancement du fonds de dotation et de l’association de défense de la liberté académique
Afin de donner vie, avant la présidentielle, au fonds de dotation et à l’association de défense de la liberté académique imaginés il y a quelques mois, l’après-midi du jeudi 17 mars sera consacrée au lancement du projet. Il s’agira d’ouvrir la discussion sur la forme juridique, les objectifs et les garde-fous à mettre en œuvre, à partir d’une série d’exposés abordant différents aspects de la liberté académique. Le lieu et le programme seront précisés dès que possible.
Vous pouvez encore vous inscrire sur la mailing liste de préparation des statuts :
https://rogueesr.fr/20211004-2/#association
Ce que Bolloré fait à la liberté universitaire
Il y a un an exactement, le 14 février 2021, Mme Frédérique Vidal expliquait sur le plateau de la chaîne CNews qu’elle souhaitait lancer une « enquête du CNRS » pour faire la lumière sur « l’islamo-gauchisme » qui, selon elle, « gangrène l’Université ». Dans les semaines qui ont suivi, la liberté académique a subi une attaque politique inédite, promue notamment sur les chaînes du groupe Bolloré. La délation y a pris les proportions les plus absurdes, puisque dès la mi-février, même le président d’alors de Sorbonne Université, archétype du bureaucrate conformiste, y était nominativement dénoncé pour son « parti pris idéologique »… communiste. Le traitement fallacieux d’une affaire grenobloise dans laquelle la liberté académique n’était initialement pas en cause a pris des proportions dramatiques : des noms de collègues ont été livrés à la vindicte, et l’instauration d’un climat de délation a directement concouru à des rétorsions financières politiciennes par la région Auvergne-Rhône-Alpes contre l’IEP de Grenoble. Ce ne sont pas des faits isolés : il y a quelques semaines encore, à l’antenne, M. Cyril Hanouna s’en prenait nominativement à une chercheuse et à son institution, le CNRS, pour avoir osé publier une étude analysant preuves à l’appui ses biais politiques, et notamment son traitement de la candidature à la présidentielle d’un ancien chroniqueur de CNews coutumier lui aussi des falsifications historiques, religieuses, démographiques.
Non contents de vilipender le libre exercice de la raison, les médias du groupe Bolloré, depuis deux ans, promeuvent aussi activement le déficit d’intégrité scientifique dans leur traitement de la pandémie de COVID-19. Est-il besoin de rappeler le prime time de M. Hanouna à la gloire de la chloroquine au printemps 2020 (Didier Raoult et la chloroquine peuvent-ils sauver le monde ?, C8, 31 mars 2020), ou les innombrables plateaux de CNews expliquant à l’été 2020, contre toute évidence, qu’une deuxième vague épidémique n’aurait pas lieu ? Là encore, ce n’est pas un cas isolé : outre la falsification quotidienne des sciences sociales, on pourrait mentionner les invitations sans contradicteurs d’affabulateurs antivaccination ou la promotion sur les antennes du groupe d’un ouvrage co-écrit par le frère de M. Bolloré entreprenant de « prouver l’existence de Dieu » à coup de résultats scientifiques déformés et réinterprétés (« Dieu, la science, les preuves » : l’Univers a-t-il été engendré par un créateur intelligent ?, CNews, 16 novembre 2021).
Nous avons déjà analysé pourquoi l’affaiblissement des standards de probité intellectuelle fait système avec la campagne contre l’indépendance de la recherche et de l’Université. S’il y a bien un lieu où ces deux menaces n’en font qu’une, ce sont les médias du groupe Bolloré, qui tentent une synthèse entre un conservatisme de guerre froide et un « libertarianisme » sans frein. Dans cet espace, la liberté académique tout comme la liberté d’informer sont réduites à une caricature monstrueuse de « liberté d’opinion » autorisant à dire n’importe quoi sans argumenter ni se confronter aux faits. Ce groupe est en passe de s’octroyer un quasi-monopole sur la distribution des livres et de devenir hégémonique dans le secteur éditorial : il possédera bientôt plus de 70 % des livres scolaires, la moitié des livres de poche, une centaine de maisons d’édition. Défendre la liberté académique impose de réagir à cette menace. Le 16 février 2022, une initiative fédérant des journalistes, des maisons d’édition, des associations, des syndicats et des chercheurs a appelé à une saisine de l’Arcom en prélude à une action judiciaire.
Considérant que la liberté académique sera menacée en France aussi longtemps que ce déluge de falsifications et de calomnies se poursuivra, nous avons décidé de soutenir cette initiative.
50 questions pour les candidates et les candidats à la présidentielle
Nous adressons aux équipes des candidates et des candidats à l’élection présidentielle une liste de questions qui intéressent l’ensemble de la société et qui permettent de mesurer la place de la recherche, de l’enseignement et de l’Université dans leur vision de notre avenir collectif. Les réponses seront publiées au fur et à mesure de leur réception, sur le site :
https://www.franceuniversite.fr/reponses/
Les questions sont organisées en neuf grandes sections :